2014 est l’année qui lance la commémoration du centenaire de la Grande Guerre. Pour un média comme la Télévision cela à commencé par la diffusion cette semaine des deux premières parties de Apocalypse 14-18. Mais pour la BD, cette célébration a commencé dés le mois de janvier avec l’exposition dédié au magnifique travail de Jacques Tardi sur cette période lors du FIBD d’Angoulême. Cette expo que j’ai eu la chance de visiter m’a donné envie de m’atteler au sujet et il était normal de commencer par l’un des livres du maître Tardi lui-même.
Août 1914 c’est la mobilisation générale en Europe. L’archiduc François-Ferdiand, héritier de l’Empire Austro-Hongrois vient d’être assassiné ainsi que sa femme dans la ville de Sarajevo. L’Histoire va alors se mettre en marche et l’impensable va devenir réalité. Par un jeu d’alliance que peu d’observateurs avaient imaginé, l’Europe va s’embraser et devenir l’épicentre d’un séisme qui touchera toute la planète, de l’Europe à l’Océanie en passant par l’Amérique. La Première Guerre Mondiale éclate, et la plus grande boucherie que l’humanité est connue commence.
En ce début de conflit tout le monde est confiant pourtant. Les Français pensent enfin tenir leur revanche de 1870 et les Allemands se voient déjà étendre l’Empire Germanique jusqu’aux Pyrénées. C’est l’heure des premiers départs vers les lignes de fronts et des milliers de soldats s’entassent dans les wagons à bestiaux. Parmi eux, il y a un petit fantassin, le gars ordinaire qui n’a rien demandé, un ouvrier tourneur Parisien qui sait, même s’il ne fait pas partit des grands pontes de l’état-major que la victoire ne sera pas si simple que prévue. Déjà les Allemands étaient censés ne pas envahirent la neutre Belgique, bah il l’ont fait quand même ! Et puis qui a décidé de leur foutre sur le dos ces espèces d’habits de clown… bleu et rouge, sympa le camouflage ! Notre soldat ouvrier va vitre découvrir la violence, la vie de misère dans les tranchées, les journées rythmées par les assauts debout face aux lignes ennemies, la fleur au fusil, avec comme seule protection l’épaisseur de sa baïonnette… putain de guerre !
Nous, avec nos gamelles en fer-blanc et toute la quincaille qu’on trimballait sur les endosses, on aurait dit la foire à la ferraille. Ajoutez à ça le raffut des bouthéons, des bidons, des pelles et des marmites, et on pouvait dire sans se tromper qu’on n’était pas discrets dans la campagne, d’autant plus qu’avec nos costumes de cirque, on était des cibles épatantes.
Elle était attendue cette réédition et pour le coup nous avons droit à une intégrale magnifique enfin à la hauteur du contenu même si la première édition – celle sous forme de quotidien que Tardi aime tant – était déjà très originales et intéressante de part son format hors norme faisant de chaque case un tableau. Ici l’édition est d’un format plus standard, donc plus pratique. Elle est largement enrichie par un carnet de 20 pages remplis de photos et agrémenté d’un texte (également présent dans les précédentes éditions) écrit par Jean-Pierre Verney – éminent spécialiste de cette période – vous expliquant les principaux événements de 1914 à 1919, un complément indispensable a la bande dessinée. Jacques Tardi et Jean-Pierre Verney nous convie donc à suivre ce soldat au nom inconnu qui traversera la guerre en racontant son quotidien et celui de ses frères d’armes qui tout comme lui ne sont que de la chair à canon. C’est un aperçu très complet du conflit qui est offert au lecteur, tous les aspects lui sont expliqué, de la mobilisation générale de 1914, à l’évolution technique de l’armement significative avec notamment l’arrivée des chars d’assauts, aux grandes batailles sanglantes tristement célèbres telles que Verdun bien sûr, Arras, la Somme ou encore le chemin des dames. Autant de boucheries qui vous glace le sang par le propos violent de Jean-Pierre Verney et le trait réaliste de Tardi. Ce dernier y va de bon cœur, exhibe les tripes, les corps démembrés, montre les conditions de vie déplorables dans les tranchées, la folie des hommes, les charges suicidaires des fantassins et les gueules cassées. Les dialogues, tout comme les voix off signés J.P Verney sont dans l’esprit de l’époque, crû et familiers. Il est même parfois assez difficiles de comprendre certains termes d’argot, ce qui explique la présence d’un lexique bien pratique en fin d’album. Putain de guerre ! est aussi un album engagé qui réhabilite la réalité historique et dénonce principalement la folie de ces hauts gradés, hommes d’États ou Empereurs qui ont envoyé des millions de soldats se faire trucider pour parfois juste progresser de quelques centaines de mètres ou pour conquérir une colline qui sera perdue le lendemain. Cette absurdité et cette violence sont couchées sur le papier par un Tardi inspiré qui n’ai jamais aussi bon que pour dessiner l’horreur de la Première Guerre Mondiale au travers de grandes cases qui lui laisse une totale liberté. Putain de guerre ! est un album indispensable.
Je vous le disais plus haut, je ne sais pas pourquoi mais j’ai eu envie de m’intéresser un peu plus en profondeur à cette Première Guerre Mondiale et du coup, non seulement, j’ai un peu rattrapé mon retard en terme de lecture en lisant Les Folies Bergères de Zidrou et Porcel, ainsi que Mauvais genre de Chloé Cruchauchet. Deux albums exceptionnels qui traitent également de cette période mais pas tout à fait de la même manière, j’y reviendrais à la fin du mois. Mais j’ai aussi décidé d’aller visiter le musée de la Grande Guerre du pays de Meaux, cité comme source par J. Tardi et J.P Verney dés la première page de ce Putain de guerre !
Et franchement c’est un superbe musée qu’il faut visiter si vous habitez en Seine et Marne ou pas trop loin. Une visite qui vous prendra pas loin d’une demi-journée si vous souhaitez vraiment ne rien manquer. La première impression est assez surprenante en entrant dans ce bâtiment d’architecture moderne et abritant ces collections centenaires. Vous y découvrirez également des tranchées reconstituées, d’impressionnants et authentiques avions, chars d’assauts, obus d’artilleries, etc… Et puis le plus importants finalement, la visite est didactique, ludique. Une bonne idée de sortie, pas joyeuse certes mais instructive !
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